Publié le 14 sept. 2023 à 19:11Mis à jour le 14 sept. 2023 à 19:19
« Venez, j’ai les clés, je vous ouvre. » La petite voix qui accueille se reconnaît entre toutes. Une signature, initiales CG. Au 5 bis, rue de Verneuil, 75007 Paris, c’est Charlotte Gainsbourg herself qui assure la visite guidée audio. On avait quitté l’actrice-chanteuse-égérie pleurant cet été la gloire de sa mère, Jane Birkin, on la retrouve célébrant en cette rentrée le château de son père, Serge Gainsbourg. A partir du 20 septembre, elle ouvre au public la mythique maison de ce dernier. Enfin.
Trente-deux ans que les admirateurs de l’homme à la tête de choux poireautent à la porte, au pied du mur où les graffitis en la mémoire de « Jane for ever » ont à présent rejoint ceux pour Gainsbarre.
Voix privée
Trente-deux ans que Charlotte hésitait, main sur la poignée. Pour la fermer, d’abord. Quand Serge et sa dernière Gitane s’éteignent en 1991, elle n’a que 19 ans. Déjà césarisée mais encore enfant, l’effrontée Charlotte veut faire son deuil en paix. Les ex-fans des sixties attendront. Sous son impulsion, la maison est figée, comme le souvenir de ce père à côté duquel elle s’est allongée en le découvrant inanimé un funeste matin.
Mais maintenant, entrez, entrez. Promis, elle est « prête à partager », elle a appris à « lâcher », elle « écoute », elle « reçoit ». Et elle donne, distillant les anecdotes sur cette maison de poupées, deux étages, pièces étroites et plafonds bas, mélange un peu confus, à son image, de charme britannique et d’élégance parisienne.
Piano et Repetto
Rien n’y a bougé. Ni le piano Steinway du salon, ni le fauteuil de dentiste du bureau, ni la photo de Bardot de l’entrée. Les Repetto blanches et les chemises en jean sont aussi là. Bienvenue dans sa maison d’enfance, celle où la nuit, elle préférait « pisser par la lucarne plutôt que passer devant ce salon terrifiant », confie-t-elle au « Monde ». Portes ouvertes, on vous dit.
Fini de danser la Javanaise sur le palier, quand, partant à gauche, revenant à droite, elle n’allait nulle part avec ce projet auquel elle pensait « depuis toujours ». Jean Nouvel, François-Henri Pinault, Bertrand Delanoë et d’autres avaient bien sonné à la porte pour aider. Jamais elle n’avait franchi le pas, retenue par sa pudeur et par les hésitations de sa mère. Du passé. L’« orpheline », comme elle se qualifie, s’assume aujourd’hui en maîtresse de maison qui sait recevoir.