Le boulet judiciaire de Donald Trump s’est encore alourdi lundi 14 août 2023. La procureure d’Atlanta Fani Willis a prononcé une nouvelle inculpation de l’ancien Président. Le milliardaire populiste et dix-huit proches – parmi lesquels son chef de cabinet Mark Meadows et trois de ses avocats — devront répondre ensemble d’une entreprise criminelle ».
Ils sont accusés d’avoir tordu le bras des autorités de l’État de Géorgie (sud des États-Unis), fin 2020, pour qu’elles inversent le résultat de la présidentielle remportée par le démocrate Joe Biden.
Scénario rocambolesque
Selon le rocambolesque scénario mitonné par Rudy Giuliani, ancien maire de New York, et John Eastman, un constitutionnaliste dévoyé, le secrétaire d’État de Géorgie Brad Raffensperger devait obéir à Trump qui lui réclamait 11 780 suffrages ». Le gouverneur Brian Kemp n’aurait plus eu qu’à substituer des grands électeurs trumpistes à ceux gagnés par Biden. Les deux responsables géorgiens, républicains l’un et l’autre, avaient rejeté cette combine. Et contribué à sauver les États-Unis d’un simili coup d’État.
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Cette vaine manœuvre vaut à Trump treize nouveaux chefs d’inculpation, quarante-deux au total avec ses comparses poursuivis au titre du RICO Act, une loi antimafia. Ces chefs s’ajoutent aux déjà soixante-dix-huit collectionnés l’ex-Président depuis avril, dans trois affaires distinctes : l’achat du silence d’une actrice du X à New York, l’assaut de ses partisans contre le Capitole à Washington en 2021 et l’escamotage de centaines de documents confidentiels de la Maison-Blanche, emportés avec lui en Floride.
Un tournant ?
L’accumulation finira-t-elle par couler la candidature de Trump, qui veut reconquérir la Maison-Blanche en 2024 ? C’est ce que pense Geoff Duncan, l’ancien vice-gouverneur de Géorgie, qui a témoigné à charge lundi devant un grand jury. Politiquement, c’est un moment pivot pour le pays »,
a-t-il déclaré en sortant du palais de justice d’Atlanta. En tant que républicains, nous devons nous soigner, réaliser que l’élection de 2020 n’était pas truquée (au profit des démocrates, NDLR) et admettre que Donald Trump était le pire candidat qu’ait jamais eu notre parti.
Des ténors prennent désormais leurs distances. Le gouverneur de Floride Ron DeSantis, son principal rival dans la course à l’investiture du Parti républicain, vient d’abandonner Trump en rase campagne : Bien sûr qu’il a perdu ! Joe Biden est le Président »,
a-t-il déclaré le 7 août sur NBC. Autre rival, l’ex-gouverneur du New Jersey Chris Christie l’a traité de menteur ».
Pour le Texan Will Hurd, Trump « n’est candidat que pour éviter la prison », et sa candidature offrirait quatre années supplémentaires à Joe Biden ».
Repoussoir pour les électeurs modérés
Qu’en disent les électeurs ? Les sondages pointent un paradoxe. Tous indiquent que les fans font bloc. Trump n’a jamais été aussi haut (54,4 %, en moyenne) dans les intentions de vote aux primaires républicaines du printemps prochain. Depuis sa première inculpation, en mars, il a doublé son avance sur DeSantis (15 %).
Mais les mêmes enquêtes révèlent une dégradation de l’image de Trump, avec en moyenne 56 % d’opinions défavorables. Les analystes scrutent particulièrement les indépendants, cette petite moitié de l’électorat qui fera pencher la balance à la présidentielle. Ipsos les a sondés en juillet : 37 % disent que ses ennuis judiciaires les éloignent de Trump, 8 % qu’ils les rapprochent. Surtout, selon un autre sondage du Marist College, 62 % souhaitent que le milliardaire retire sa candidature.